Mon grand-père ce héros

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Que faisait François Hollande au Mont Valérien?

Regarder distraitement en cette soirée du 18 juin le journal télévisé et se rappeler soudain qu’il n’y a pas que Waterloo à commémorer ce jour-là. L’appel d’un Général aussi. Voir sur l’écran le Président de la République au Mont-Valérien passer en revue quelques troupes et entendre tout à coup, émergeant du ronron d’un commentaire, le nom de Julie Gayet. La voir sur l’écran, toujours aussi jolie, élégante et souriante. Laisser échapper une première réflexion : « tiens, qu’est-ce qu’elle fait là celle-là » ? On a entendu vaguement parler d’une opération de communication qui serait en cours pour progressivement introniser l’actrice dans un statut de « première dame ». Selon la formule heureuse d’un journaliste inspiré, dans la perspective des élections présidentielles l’Élysée aurait lancé « la compagne officielle » avant la « campagne officielle ». Le Hollande bashing est devenu une seconde nature pour beaucoup. Stimulé par quelques splendides et hispaniques catastrophes protocolaires récentes, et une consternante capacité à être systématiquement à côté de la plaque. On va donc, par réflexe désormais, ricaner et dégoiser. « Sa starlette au Mont Valérien maintenant ! » Mais voilà que la dame aide un vieillard chenu tout sourire, à sortir d’une voiture pour l’installer sur une chaise roulante qu’elle va se mettre à pousser. Le commentateur nous dit qu’il s’agit de son grand-père, ancien résistant de 93 ans. La presse du lendemain, un peu goguenarde, qualifiera la séquence d’alibi pour justifier la présence de Madame Gayet à la cérémonie.

Le problème c’est qu’il a une sacrée gueule l’alibi. Alain Gayet, encore écolier, a rejoint Londres pour s’engager dans la France Libre le 1er juillet 1940, il avait 17 ans. Il fera absolument toutes les campagnes de la France Libre de Dakar à Berchtesgaden. Compagnon de la Libération par décret du 17 novembre 1945. Ils étaient 1038 Compagnons comme lui. Il en reste 9 aujourd’hui, le dernier d’entre eux à quitter ce monde reposera dans la crypte du Mont-Valérien. Alain Gayet est de cet ultime carré. Revenu à la vie civile à la fin de la guerre, il entreprendra des études de médecine, devenant chirurgien. Comme l’aurait voulu son camarade François Jacob, empêché par ses graves blessures. Qui se tournera vers la recherche, histoire d’obtenir un prix Nobel. Destins extraordinaires qui continuent de fasciner aujourd’hui provoquant admiration et tendresse. Et soudain, on est content que sa petite fille, dont il doit être fier, conduise son grand-père ce héros. Dont le sourire heureux montre qu’il ne doit pas être dupe de l’opération de communication qui se joue. Mais n’a-t-il pas mérité ce cadeau ?

Alors ravalant ricanements et quolibets, on rectifie la position et on salue. Normal.

Laissant quand même le dernier mot à cet ami jamais en retard d’une méchanceté : « Bien sûr, la présence de Julie Gayet était légitime, mais François Hollande qu’est-ce qu’il foutait là ? »

Régis de Castelnau

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