Les réquisitions du parquet dans l’affaire des emplois d’assistants parlementaires européens du rassemblement national font grand bruit. Les mêmes polémiques, la même volonté d’instrumentaliser la justice à des fins politiques, Jusqu’à la prochaine fois. La même lâcheté, par refus de regarder en face le problème tel qu’il est.
La justice française est devenue un pouvoir politique.
Il ne s’agit pas de se contenter de dire qu’elle est politisée, ou qu’elle ne fait qu’obéir aux ordres du pouvoir exécutif. Non, elle a construit depuis 30 ans une indépendance et une autonomie vis-à-vis des deux autres pouvoirs séparés. Paradoxalement, elle ne l’a pas fait pour devenir une autorité impartiale, mais grâce à cette indépendance reconquise elle installée son parfait contraire. Elle fonctionne aujourd’hui comme un pouvoir politique, prenant ses décisions non à partir des ordres reçus de la sphère politique, mais à partir des opinions philosophiques idéologiques et surtout politiques des magistrats qui composent le corps. Lequel marqué par une sociologie particulière et homogène, considère qu’il dispose d’une autorité sur la société à qui il peut imposer ses idées, sa morale, et son idéologie. Allant même, comme l’avait fait les dirigeants des deux principales organisations syndicales dans un article ahurissant, jusqu’à revendiquer cette partialité.
Bénéficiant de la lâcheté de la classe politique, la justice française s’est installée en surplomb et impose par la conduite de ses procédures et le contenu ses décisions, la vision qu’elle a de ce que doit être la société française. Or ne disposant pas de la légitimité démocratique que donne l’élection, cette prétention est irrecevable.
Il ne s’agit pas ici de souscrire à la thèse d’une innocence du RN bafouée, mais de rappeler qu’il s’agissait bien d’une procédure politique, caractéristiques établis par la formule en forme d’aveu, utilisée par le parquet pour refuser de requérir une relaxe sur une partie du dossier.
Il ne s’agit pas non plus d’imaginer on ne sait quel complot visant à mettre la société française en coupe réglée. Non plus simplement de constater un dévoiement qui aboutit à des dérives gravissimes.
L’implication politique de la justice française repose sur un engagement spontané en faveur du système institutionnel oligarchique connaît la France. Qui s’organise autour de trois fonctions directement politiques :
• le soutien au système Macron comme l’a montré la forme de coup d’État judiciaire du printemps 2017 pour disqualifier François Fillon et faire élire Emmanuel Macron. Ce choix fut ensuite complété par un soutien sans faille visant à protéger un système très corrompu, des aléas judiciaires qu’il devrait pourtant encourir. D’Alstom à McKinsey en passant par le Fonds Marianne et tant d’autres, les affaires oubliées, enlisées, disparues, les procédures interminables, les relaxes opportunes, les exemples de cette protection sont légion.
• La répression judiciaire féroce des mouvements sociaux, dont les luttes contre la réforme des retraites et surtout le mouvement des gilets jaunes ont donné le triste exemple.
• Le troisième élément de ce triptyque est celui des procédures contre les adversaires politiques que l’on laisse mijoter et que l’on active lorsque cela apparaît nécessaire. Jean-Luc Mélenchon en sait quelque chose avec entre autres l’épisode de sa colère homérique (et justifiée), et la récente mise en examen de Sophia Chikirou. On y trouve évidemment les différentes procédures dont Marine Le Pen a été l’objet et le traitement de la dernière en date, l’affaire des attachés parlementaires.
L’auteur de ces lignes a réalisé un travail assez important sur ce sujet publié il va y avoir quatre ans. Malheureusement il est resté complètement d’actualité.
La France a un énorme problème avec sa justice. Privée des moyens matériels indispensables qu’on refuse de lui donner, incapable de traiter une insécurité qui gangrène l’espace public, devenue aussi une institution politisée, elle a complètement perdu la confiance des citoyens comme le démontrent toutes les études d’opinion.
Bravo pour le constat.
Excellent.
Excellentissime.
C’est comme ça que je vous aime.
Super
Une analyse plus que pertinente
Au passage si le système politico-judiciaire met Le Pen sur la touche qui va donc pouvoir servir de tremplin pour les prochaines présidentielles ?????
En fait on ne nous demande pas de voter POUR des idées mais CONTRE le RN qui est en deuxième position depuis des lustres
Le résultat est là et bien là puisque gouverner = obéir servilement aux injonctions d’un machin appelé « Europe », en fait l’état profond USA ………
On continue ?????????????
Malheureusement, nous devons constater que nous ne sommes plus en démocratie:
il n’y a pas séparation des pouvoirs ( dans l’Union Européenne la commission organe non élu cumule pouvoirs législatif, judiciaire et exécutif), mais aussi en France : nous ne sommes plus en démocratie puisque les juges, en plus de leur pouvoir judiciaire se sont accaparés des rôles législatifs et exécutifs. Alors cessons de faire passer la France pour un modèle de démocratie.
Bonjour M. Castelnau,
Pouvez-vous nous préciser en quoi les réquisitions sont abusives si là est une partie du problème ?
Merci !
Cordialement
Vous ne voulez quand même pas qu’un avocat critique des décisions de justice, non ?
(à RdC oui, je sais ce ne sont pas les bon termes)
🙂😛😇
Avec la plus grande déférence pour vos pertinents et percutants commentaires, permettez-moi de vous poser une simple question: comment la société devrait-elle traiter les plaintes d’abus de confiance, de corruption de fonctionnaire, de commission secrète, de détournement frauduleux de fonds publics, de trafic d’influence, en somme, toutes ces pratiques pour le moins répréhensibles, voire pénales et même criminelles, auxquels se livrent certains/certaines politiciens/politiciennes afin de dévoyer la «démocratie parlementaire», d’arrondir leurs fins de mois et plus souvent encore pour s’assurer une sinécure dorée après qu’ils aient complété leur service parlementaire au profit de leurs bailleurs de fond électoraux, les milliardaires qui financent leurs campagnes?
Comment traiter «la donneuse de leçons par excellence», celle-là même pour qui la «violation» des lois sur l’immigration rend leurs auteurs passibles de la peine de mort par l’extradition dans des pays où le bourreau les y recevra alors qu’elle dévoie les fonds publics destinés à des fins non partisanes à ses propres fins politiques partisanes?
Comment traiter un candidat à la présidence d’un pays qui pour tromper l’opinion publique masque ses frasques sexuels par des fraudes fiscales corporatives avérées?
D’entrée de jeu, ne doit-on pas d’abord constater qu’«il y a quelque chose de pourri au royaume»… de la politique et qu’il ne doit y avoir personne au-dessus des lois, surtout pas l’abjecte donneuse de leçons et le milliardaire orange qui tous deux menacent le monde, des suprémacistes,racistes et militaristes capitalistes déchaînés.
Par conséquent, la société ne doit-elle pas tout mettre en œuvre pour que ces renégats rendent compte de leurs actions illégales?
Quel forum convient le mieux pour en décider?
Le système médiatique en raison de sa partialité flagrante au service de ses propriétaires, les milliardaires capitalistes profiteurs, n’offrent aucune garantie de justice, loin s’en faut.
Le système électoral dominé entièrement par l’argent, le mensonge et la propagande démagogique des candidats/candidates et celle des merdias mainstream tout aussi pourrie est pire encore.
Ne reste, dès lors, que le système judiciaire même s’il est dominé par des magistrats du parquet et des procureurs de la République,nommés par le Président de la République, sur proposition du ministère de la justice après avis du Conseil de la Magistrature, au cas des juges et sur simple avis du Conseil Supérieure de la Magistrature au cas des procureurs, œuvrant sous l’autorité du Ministre de la justice, une puissante communauté «présidentielle» il est vraie mais qui se targue d’«indépendance» puisque chacun est «nommé» durant «bonne conduite», selon l’avis des pairs.
Face à cette armée de «nommés» par le Président de la République, l’inculpé n’en a pas moins la faculté de se défendre et de soulever un doute raisonnable quant à sa culpabilité, qu’offrir de plus? L’immunité de poursuite?L’impunité?
Comme l’écrivait Aristote dans l’«Éthique de Nicomaque, Livre II,9.4»:«[E]ntre deux maux, il faut choisir le moindre» et la voix judiciaire est certainement un moindre maux pour la société que l’impunité ou l’immunité,vous en conviendrez cher ex-confrère d’outre-mer.
Ceci étant écrit, j’insiste pour souscrire entièrement aux propos de votre ouvrage à l’effet que le système judiciaire est instrumentalisé par le pouvoir politique, lui-même au service des puissances d’argent, pour recourir à son contrôle du système judiciaire par le Ministre de la justice, les nominations, les promotions et le financement pour servir ses propres fins et éliminer ou du moins discréditer les adversaires des potentats en place alors qu’ils réalisent que la mascarade électorale et la propagande de leurs merdias ne suffiront pas à leurs assurer la victoire à la mascarade électorale.
En conclusion, je vous soumets respectueusement que le problème du système judiciaire consiste en son instrumentalisation au seul service du gouvernement au pouvoir alors qu’il devrait traduire en justice TOUS LES CONTREVENANTS SANS EXCEPTIONS, aussi bien dire TOUS LES POLITICIENS BOURGEOIS et rien de moins.
Le tout humblement soumis.
Lisez donc mon livre. Vous verrez après tout s’éclaire…
l’appareil judiciaire français qui dispose de la violence légitime est spontanément au service de l’oligarchie. C’est un danger. Les couches populaires en général et la classe ouvrière en particulier en ont tout à en redouter.
Je vous remercie de cette réponse et soyez assuré que je vais me le procurai et le lire attentivement car j’ai la certitude que j’y apprendrai beaucoup de choses applicables au Canada car notre système judiciaire est aussi de nature bourgeoise.
J’avoue que mon commentaire était généraliste et superficiel.
J’en profite pour vous remercier et vous féliciter ainsi que tous vos collaborateurs pour votre excellent travail de réinformation même si nos vues peuvent quelques fois diverger, j’ai l’intime conviction qu’il s’agit de contradictions au sein du peuple qui peuvent être solutionnées par la confrontation démocratique prolétarienne.
Recevez mes salutations respectueuses.
Je vous lis tous les jours depuis un certain temps pour me donner courage, et trouver un écho à mes propres réflexions. J’admire votre combativité. Je ne crois plus à une réforme des institutions corrompues jusqu’à la moelle, mais à un électrochoc collectif pour sortir du consentement à la servitude volontaire qui est fabriqué par nos élites (c’était déjà dans le programme de Walter Lippmann, dès 1922, par un système de propagande utilisant les médias), elles-mêmes s’étant affranchies de leur peuples ; c’est-à-dire de toute éthique de la responsabilité ou exemplarité. Je les crois cupides et d’une certaine façon nihilistes, totalement au-dessus des règles qu’elles fixent pour le commun des mortels ; j’irai même jusqu’à dire perverses : dans une telle société néolibérale ce sont effectivement les pires d’entre les hommes qui seront amenés à diriger les autres – c’était déjà dans le programme de Mandeville dès le début du XVIIIème siècle, cf. la Fable des abeilles (c’est la vérité ésotérique, qu’on cherche à cacher et réservée à un cercle d’initiés, du libéralisme dès ses origines).
Les milliardaires, dont le modèle emblématique est Elon Musk, ont acquis le statut de demi-dieux quasiment omnipotents pour qui absolument tout est permis, dans la toute-puissance illimitée – reconnaissant l’utilité des lois mais seulement pour ceux qui y obéissent et contribuent ainsi servilement au fonctionnement de la société ; leur seul limite, provisoire selon la doctrine de la singularité technologique, étant qu’ils sont encore mortels. Nos élites s’apparentent à de la racaille en ce qu’elles ne respectent pas les lois qui réglementent la vie du commun des mortels, ce dernier se croyant obligé de faire preuve d’exemplarité (à cet égard Marine Le Pen fait véritablement pitié dans la manière dont elle est maltraitée par les élites, malgré tous ses efforts qui font encore davantage pitié tant elle tire la langue, que je crois sincères d’exemplarité) ; mais à la différence de la racaille elles admettent l’absolue nécessité des lois… mais seulement pour les autres afin de maintenir l’ordre (maintien de l’ordre qui est d’une importance capitale pour le système oligarchique) !
Le système oligarchique qui désormais réglemente le fonctionnement des sociétés occidentales, me semble incompatible avec l’idée de contrat social cher à Rousseau, au fondement de notre idéal démocratique. L’électrochoc salutaire serait une sorte de prise de conscience collective, comme s’essuyer le cul avec ce contrat qui n’a plus de sens et ne représente plus rien, et le renvoyer à la gueule de nos élites.
Toujours la flèche fichée en plein centre, Maître de Castelneau!