En novembre 2016, François Fillon fut, à la surprise générale, choisi pour représenter la « droite républicaine » à la primaire ouverte organisée par les LR. Tout le monde s’attendait au retour de Nicolas Sarkozy et les dispositifs politico-médiatico-judiciaires étaient fin prêts pour barrer la route à celui qui avait réussi à provoquer dans les couches moyennes une détestation finalement assez voisine de celle qui frappe Donald Trump outre-Atlantique. C’est la bourgeoisie qui se déplaça à la primaire, et portant son choix sur un profil de notaire de province guère enthousiasmant. Lequel était donné quasiment élu d’avance.
Les socialistes réunis autour de François Hollande le président sortant, incapable de se représenter, « comme vomi par le pays » (Emmanuel Todd), durent en urgence changer leur fusil d’épaule. L’opération fut organisée par Jean-Pierre Jouyet secrétaire général de l’Élysée, le Canard enchaîné et Éliane Houlette patronne du Parquet National financier. L’objectif était clair, disqualifier François Fillon et favoriser l’élection d’Emmanuel Macron alors ministre de l’Économie après avoir été secrétaire général adjoint de l’Élysée. On connaît la suite…
Il paraît que diable se niche dans les détails, mais l’adage se révèle d’autant plus vrai que ceux qui sont chargés d’informer l’opinion transforment les faits importants en détails. Le Conseil constitutionnel vient de rendre une décision importante à double titre. D’abord, il a déclaré inconstitutionnel un article du Code de procédure pénale qui interdisait de soulever des nullités de procédure dans les instances pénales. Ensuite, avec cette décision, la procédure commencée en 2017 contre François Fillon va devoir reprendre au niveau de la Cour d’appel et les nullités soulevées par l’ancien candidat à la présidence de la République vont devoir être examinées. Ce n’est pas rien d’apprendre que notre cour suprême met fin à une violation de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’Homme et que la procédure pénale qui a permis de disqualifier François Fillon, assurant ainsi l’arrivée du parfait inconnu, Emmanuel Macron au pouvoir, va devoir en partie être recommencée. Mais cela n’a guère intéressé le système médiatique français. Tout le monde s’est contenté de reprendre mot pour mot la dépêche de l’AFP qui ne disait pas grand-chose, et de revenir à ce qui est important, à savoir l’invasion en France des punaises de lit.
Petit retour en arrière : le cauchemar de François Fillon a donc commencé le 25 janvier 2017 lorsque le Canard enchaîné, qu’on imagine dûment informé par les amis d’Emmanuel Macron, publie un article selon lequel l’ancien premier ministre aurait salarié son épouse comme attachée parlementaire. Le même jour, dans la matinée, PNF, organisme créé par François Hollande pour garantir la protection de ses amis, ouvrait une enquête préliminaire pour poursuivre l’horrible crime. Dont il faut rappeler qu’il a été perpétré par une part importante des parlementaires français depuis 40 ans, mais dont le reproche pénal ne fut fait qu’à François Fillon. Bruno Le Roux, ministre socialiste, et Bruno Le Maire, ministre macroniste, également pratiquants assidus de ces facilités, n’ont jamais été véritablement importunés.
Sans culture judiciaire, François Fillon ne vit pas arriver le missile lancé contre lui et commit toutes les erreurs possibles avant de se retrouver mis en examen 47 jours plus tard, à trois semaines de l’élection présidentielle. Le tout après la procédure la plus rapide de l’histoire judiciaire française, et dont toutes les péripéties furent évidemment étalées dans la presse, en violation de la loi. L’opération, dont c’était l’objectif évident, a abouti à ce que François Fillon finisse troisième au premier tour, permettant ainsi à Emmanuel Macron d’être opposé à Marine Le Pen au second tour et d’être assuré d’entrer à l’Élysée. L’auteur de ces lignes a écrit un ouvrage qui détaille dans quelles conditions ce raid s’est effectué et comment la magistrature a accepté de mettre la main à la patte à la dernière étape d’une opération concoctée par la haute fonction publique d’État et soutenue par l’oligarchie.
Par la suite, il a fallu justifier cette procédure et faire oublier cette intervention directement politique. Les juridictions saisies sur le fond déclarèrent François Fillon coupable et prononcèrent des peines inhabituellement sévères, assortissant leurs décisions de cours de morale publique, sentencieux et intempestifs. Leçons qui sont devenus d’ailleurs une habitude dès lors que ce sont des membres de la classe politique qui sont poursuivis. Comme pour les affaires Sarkozy, la Cour de cassation valida tranquillement toutes les acrobaties procédurales.
La Cour d’appel de Paris confirma la condamnation de François Fillon et celui-ci se pourvut alors en cassation. Et c’est à ce stade qu’il formula sa Question prioritaire de constitutionnalité (QPC) pour faire constater par le Conseil le caractère inconstitutionnel de l’article 385 du code de procédure pénale. Celui-ci interdit que l’on puisse soulever des nullités de procédure postérieurement à l’ordonnance de renvoi du juge d’instruction devant le tribunal. C’est une violation légale grossière des droits de la défense due au fait qu’en France, on préfère l’ordre à la justice et que l’on déteste le formalisme procédural. En oubliant ce que disait le philosophe fonctionnaliste Rudolf von Jhering : « Ennemi juré de l’arbitraire, la forme est la sœur jumelle de la liberté », François Fillon avait soulevé des nullités qu’il venait seulement d’apprendre, devant la Cour de Paris. Elles furent écartées sans même être débattues. Le Conseil constitutionnel nous a enfin débarrassés de cette atteinte aux droits des justiciables.
La lecture du considérant N°16 de la décision ne laisse pas de place pour le doute : l’arrêt de la Cour d’appel de Paris condamnant François Fillon devrait être annulé par la Cour de cassation et l’affaire rejugée devant une autre cour d’appel. Donc si l’on évalue les délais au doigt mouillé, nous aurons probablement l’arrêt d’annulation en mars 2024 avec un probable renvoi devant la Cour d’appel de Versailles pour fin 2025. On imagine que le corporatisme jouera à nouveau à plein et que Fillon sera condamné. Ce qui donnerait lieu à un nouveau pourvoi en cassation avec arrêt fin 2026. Si je peux me permettre une facétie, je conseillerais aux hauts magistrats de rendre leur décision le 25 janvier 2027, jour anniversaire de l’article téléguidé du Canard enchaîné. Ce serait assez savoureux, 10 ans tout juste après le début du raid judiciaire organisé par la bande de François Hollande — Jean-Pierre Jouyet, Éliane Houlette, Isabelle Champrenault, Serge Tournaire — pour disqualifier la candidature de François Fillon, favorisant ainsi l’élection d’Emmanuel Macron. 10 ans : cela fera les deux mandats de celui-ci. 10 ans qui lui auront permis d’abîmer la France au-delà de ce que l’on pouvait imaginer.
Je me rappelle une discussion avec le politologue Jérôme Sainte-Marie au printemps 2017, lors de laquelle il m’avait dit : « Tu ne reconnaîtras pas la France après les mandats de Macron. » Il avait malheureusement raison.
La « pâte », pas la patte….
Une raison majeure du torpillage de la candidature de François Fillon : son tropisme pro-russe était inacceptable pour l’oligarchie euro-atlantique. Cet homme ne devait pas devenir président de la République française. Sa condamnation, en l’écartant de la présidentielle, lui a sans doute évité un assassinat. Par des « islamistes fanatiques », par exemple.
Intéressant, mais difficile à prouver. Et puis, dans une situation de crise telle que celle de la fin de l’année 2021, la force du lobby pro-OTAN, notamment dans le camp de la droite, est telle qu’il aurait dû se soumettre ou se démettre, selon la formule de Gambetta…
Je suis d’accord avec Jean Lacombe.
La motivation de l’action contre M. Fillon était son tropisme russe, tropisme insupportable pour la France atlantiste qui voulait prendre depuis longtemps sa revanche sur De Gaulle.
M. Fillon aurait compris en 6 heures de conversations avec M. Poutine la problématique ukrainienne et aurait pu éviter cette guerre comme beaucoup d’autres choses.
On a préféré un apparatchik hésitant à un politicien d’expérience et de raison.
Et on a une justice en France, Monsieur!
Et on a une séparation des pouvoirs en France, Monsieur!
Ce que je conseillerais à M. Fillon, c’est de se représenter en 2027 à la présidentielle car, d’ici là, la Russie sera sortie gagnante de cette guerre. Et tout aura changé dans la politique atlantiste de la France. Ce serait ainsi le pire des affronts au mari de Brigitte comme le nomme un certain M. Mod…
Oh flûte alors !!! Fillon sera jugé au bout de 10 ans, comme n’importe quel autre citoyen – C’est absolument scandaleux !
Pourtant, il devrait s’y attendre, après avoir multiplié des appels sur le fond et sur la forme et des pourvois de cassation sur les procédures, en allant jusqu’au Conseil Constitutionnel avec une QPC ; et après avoir été premier ministre pendant 5 ans d’un État en « faillite » et à ce titre refusant de donner à la Justice les moyens de fonctionner normalement et après avoir fermé de multiples tribunaux au nom des économies budgétaires.
Pas de regret pour moi en tant que citoyen et électeur ; Fillon nous promettait de nous rapprocher d’un pays totalitaire dont son dirigeant nous menaçait déjà en 2017 du Feu nucléaire grâce à ses nouveaux missiles nucléaires hyper-véloce et qui avait envahi et bombardé de multiples pays et leur population civiles ; nous promettant aussi de supprimer 500.000 fonctionnaires et de fermer – forcément – de multiples services publics que, du point de vue des LR, les français ne méritent point, petits bouseux insignifiants à qui Fillon promettait des larmes et de la sueur.
Avec de semblables commentaires et cette haine affichée de l’Est, je comprends mieux pourquoi la France a une dette budgettée de 3.100 milliards et hors bilan de 5.000 milliards, comme se plaît à le rappeler Charles Gave. Tristes sires !
La décision du Conseil constitutionnel est suave, car elle n’aura aucune conséquence pour François Fillon. Absolument aucune. Admettons que cette décision apporte un remède à une incohérence juridique, pour d’autres personnes, à l’avenir.
En attendant, le grand silence frisé des medias français sur le sujet de cette décision, précisément, laisse rêveur.
Un grand merci à Régis de Castelnau d’en parler, d’abord, et, ensuite, d’en expliquer la signification et la portée.
Anne
Magnifique relation des faits de ce hold-up du siècle réalisé par des menteurs, des incompétents, des méprisants, des voleurs, des destructeurs, des propres à rien.
Faisons un récapitulatif des arguments de Mr de Castelnau :
D’abord, François Fillon est le seul à être poursuivi.
On peut évidemment regretté la partialité et l’opportunité des poursuites. Cependant, s’agit-il d’une raison suffisante pour ne pas poursuivre ? Si un seul casseur est attrapé, faut-il le relâché au motif qu’il n’était pas seul à avoir cassé ?
Ensuite, la procédure est anormalement rapide.
Mais dans la situation de l’élection présidentiel, François Fillon aurait l’immunité pénale grâce au mandat de président. Êtes-vous satisfait que Jaques Chirac n’est pas fait un seul jour de prison ? Que les politiques se protègent des condamnations avec leurs mandats, espérant par la suite être trop âgés pour faire un seul jour de prison ?
Puis, il y a divulgation des informations dans la presse.
Le secret ne couvrant que les déclarations faites pendant la procédure, alors que la mise en examen et les raisons de cette décision ne me semblent pas couverte par le secret de l’instruction. La seule information du motif de la mise en examen, emploi fictif de la femme d’un candidat qui voulait diminuer la dépense publique, était suffisante pour obtenir le résultat de l’élection de 2017.
Enfin, les peines sont sévères.
Je suis pour la suppression de l’individualisation des peines. Mais en application de ce principe, n’est-il pas normal de mettre de peines plus sévères aux politiques, alors que ceux-ci sont censé donné l’exemple dû fait qu’il représente le peuple ?
Sur le fond, le Conseil constitutionnel augmente les moyens de la défense.
Vous dénoncé l’adaptation de la procédure Fillon pour lui préférer l’arbitraire du Conseil constitutionnel composé des nouveaux grands féodaux qui protègent les leurs.
Vous voir défendre l’arbitraire contre la justice et l’impunité des corrompus m’interroge. La justice ne se trouve-t-elle pas dans l’ordre rétabli ?
Ce qui a été reproché à Fillon, outre qu’il n’était pas seul dans cette situation, ne relevait pas du code pénal. Cette pratique n’était pas interdite. Plus grave encore, les fausses déclarations de patrimoine de Macron elles relevaient du code pénale et le rendaient inéligible. Dûment informés, la HATVP, le parquet financier et le parquet général ont sciemment fermé les yeux.
Il a été condamné pour cela : c’est bien que cela tombait sous le coup de la loi, mais ces hommes politiques n’en avaient même pas conscience ! Je rejoins l’avis de Bouchain sur le caractère positif de ces procédures judiciaires : à mes yeux, elles contraignent les politiques à faire preuve de plus de rigueur et moins d’hypocrisie.
« à Emmanuel Macron d’être opposé à Marine Le Pen au second tour et d’être assuré d’entrer à l’Élysée. » Ben non justement, Fillon était à moins de 1.5 % de Le Pen je crois, malgré les tripatouillages qui ont tant réjouis les Français. Donc la possibilité de contrer le coup d’état juridico-politico-médiatique était encore possible dans les urnes. Autant dire que sans les tripatouillages le Macron serait reparti compter ses biftons à la banque depuis longtemps ! Les Français ont donc eu ce qu’ils méritent (ce n’est pas interdit de réfléchir avant d’aller voter, personnellement je n’aime pas qu’on me torde le bras !) La preuve en 2022 le Macron est repassé « à la régulière ». Après ils viennent chouiner sur les ronds-points quand ils s’aperçoivent -enfin – qu’ils étaient cocus ! (tous…ensemble…tous ensemble…ouai ! Sans moi !) Et tous casser dans les centres villes. Et ils rechouinent quand ils prennent des coups de triques ou des boules de gomme sur la tronche. Que les Français bouffent du Macron jusqu’à la dernière minute de son mandat ! Hollande non plus son élection n’était pas claire : sa fausse déclaration patrimoniale et fiscale aurait du invalider l’élection ! Mais les mêmes mécanismes et les mêmes acteurs (magistrature rose, merdias, populace) ont fonctionnés. 15 ans de perdus, pauvre France. 🙂 Moi ça va merci, je fais avec. Si hollande se représente en 2027 il passe les doigts dans le nez ! Les Français sont de veaux (avec une mémoire de poisson rouge), des pleurnichards, rien à en attendre de bon ! Moi qui n’ai voté ni pour hollande ni pour macron je ne bloque pas les ronds points et je ne casse pas les vitrines comme les racailles en gilet.
Avez vous lu « une justice politique » par l’auteur de ce blog ? Vous devriez !
ggrrr encore une réponse mal placée…et adressé à @BOUCHAIN
Entendu sur France-un-faux ce jour : « Sarkozy entendu par un juge d’instruction/affaire Kadhafi » miam-miam France-un-faux ! 🙂 Ô punaises à l’assemblée lfi se gratte !
🙁 Par contre toujours rien entendu sur l’objet de cet article. Nulle part ! (mensonge par omission un classique) Heureusement je ne paye plus la redevance sur les chaines publiques . Merci manu ! Faut bien que tu serves à quelque chose !
🙂 J’espère que Me De Castelnau ne nous a pas fait une blague.
J’en profite pour me corriger adressé(e) au-dessus ggrrrrr
🙂 Bon je m’en vais je voudrais pas encombrer le site comme les Dupontds Brothers !
Hors-sujet, mais In rectum intestinumo :
https://lecridespeuples.fr/2023/09/28/seymour-hersh-un-an-de-mensonges-sur-la-destruction-de-nord-stream/comment-page-1/
Le journaliste persiste, et signe.
Oh !
Européens, réagissons !
🙂 Fifi ne fait pas recette on dirait.
Pourtant dans son livre, Me De Castelnau démontre de manière argumentée et documentée, ( pages 301 -328) qu’il y avait bien eu « une altération de la sincérité du scrutin » en 2017 sur la mère de toutes les élections : la présidentielle. Evidemment les juges rose – qui étaient co-auteurs de cette altération – n’allaient pas en tenir compte…et nous eûmes macron jusqu’au trognon ! CQFD. Merci qui ? Vos petits-enfants vous maudiront quand ils finiront de payer les dettes que ce margoulin de macron a contractées en notre nom.